Petites utopies hélléniques

Il existe en Grèce, une île où se  mêlent  fiction et réalité : Ithaque. Dans l’Odyssée  elle est le pays d’Ulysse qu’il a quitté pour la guerre de Troie , et sur laquelle il finit par revenir  contre dieux, vents et marées, et après bien des péripéties d’un véritable voyage initiatique. Mais aucun des hellénistes distingués et autres archéologues, s’appuyant sur les descriptions pourtant précises d’Homère, n’ont jamais  réellement réussi à s’accorder sur sa localisation.  C’est donc une île qui répond parfaitement au concept d’Utopie (sans lieu) , ou,  comme le suggérait le poète Cavafy, sans autre réalité que cette tension pour l’atteindre, entièrement contenue dans l’expérience  intérieure du voyage.

Cette terre, j’ai donc cherché à la réinventer en installant des micro-paysages de fiction sur l’Ile Ionienne répondant sur les cartes au nom d’Ithaque. Puis, histoire de prendre au pied de la lettre sa dimension utopique, j’ai projeté sur ces sites photographiés mes propres légendes.

Dominique ROUX

Lieu dit : Palais d’Ulysse

Ces vestiges de la période classique (Vème siècle avant JC ) ne sauraient être le palais d’Ulysse puisque Homère écrivit l’Odyssée aux alentours du VIIIème siècle avant J.C. (période dite archaïque). Mais suite à de nombreuses fouilles effectuées sur la colline de Pilikata , certains archéologues estiment que c’est en lieu et place de la demeure d’Ulysse que se serait élevé ce temple d’Apollon du plus pur style dorique.

La Baie de Vathi

Vue prise du sommet d’une des falaises, qui domine au nord la baie de Vathi, capitale actuelle de l’île (2800 habitants) . Selon Victor Bérard il s’agit de l’ancien Phorkys où les Phéaciens déposèrent sur la plage Ulysse endormi .

« Le vieillard de la mer, Phorkys, a dans les champs d’Ithaque un de ses ports. Deux pointes avancées, qui dressent face à face leurs falaises abruptes, rejettent au dehors les colères du vent et de la grande houle. » (Odyssée XIII, 96-100)

Calypso

Petit village  croquignolet dans les lumières « d’aurore aux doigts de rose ».
C’est à cet endroit que selon une version apocryphe de l’Odyssée, la déesse Calypso, follement amoureuse d’Ulysse depuis son séjour en son île d’Ogygie, aurait rejoint son amant après son retour à Ithaque . Et notre héros de couler des jours heureux entre la déesse immortelle et la mortelle Pénélope…

« On y trouve de nombreuses possibilités de se loger « chez l’habitant » Sur la falaise en bordure de la mer un petit restaurant tenu par un couple sacrifiant à la déesse Lesbos : « Chez Pénélope et Calypso » (ça ne s’invente pas !!!). Excellent accueil et bon rapport qualité prix » .(Le Guide du R…)

Le Lotos : culture et effets

La fameuse terre rouge d’Ithaque s’avère excellente pour la culture de la vigne mais aussi du lotos. De nombreux petits propriétaires cultivent en toute liberté cette drogue dont les effets ne se font sentir que sur place, la rendant impropre à l’exportation . Ces plantes qui se mangent, se fument ou se distillent dans l’ouzo produisent une merveilleuse sensation d’euphorie liée au simple plaisir d’être pleinement là et le désir d’y demeurer. Par contre une fois quittée l’île et ses lotos, le manque plonge dans une profonde nostalgie le voyageur qui n’a de cesse que d’y revenir.

La Pierre au corbeau.

Le haut plateau rocheux qui occupe toute la moitié sud d’Ithaque se termine par des falaises qui offrent au pied de leurs abrupts d’assez bons abris sous roche, protégés du Borée, c’est-à-dire du vent du Nord. C’est là que Victor Bérard localise la Pierre du Corbeau, cependant que non loin de là, la source Parapigadi, toujours utilisée par les habitants d’alentour,  parait être la source Aréthuse du poète.

Athena à Ulysse : » Il faudra tout d’abord t’en aller chez Eumée, le chef de tes porchers : il te garde son cœur ; il chérit ton enfant, ta sage Pénélope ; c’est près de ses pourceaux que tu le trouveras . Ils ont leurs tecs au bord de la Pierre au Corbeau, sur la source Aréthuse »
(Odyssée.Chant VIII ,401-408)

Lotissement avec vue sur le canal d’Ithaque

Malgré la richesse de sa mythologie, Ithaque s’est peu développée sur le plan touristique. C’est ce qui la protège entre autre des sombres réalisations immobilières que l’on peut trouver sur d’autres îles ioniennes. Pourtant depuis quelques années on constate sur la côte Ouest qui domine le canal d’Ithaque quelques constructions à vocation touristique qui fort heureusement ont su respecter l’architecture locale et dont l’alignement n’est pas sans évoquer un des exploits d’Ulysse : l’épreuve du tir à l’arc.

« Il l’ajusta sur l’arc, prit la corde et l’encoche et, sans quitter son siège, il tira droit au but. D’un trou à l’autre trou, passant toutes les haches, la flèche à lourde pointe sortit à l’autre bout »
(Odyssée Chant XXI, 415-420)

Le temple de Zeus

Ici, sur le plus haut sommet d’Ithaque, le Mont Neritos (800 mètres) se dresse le temple de Zeus construit en 432 avant J.C. par Ictinos et Callicrates, les architectes du Parthénon d’Athènes.
Il est étonnant de constater que les vestiges de l’époque classique ont mieux résisté au terrible tremblement de terre de 1953 que l’architecture vénitienne dont il ne reste presque plus trace.

Nausicaios

Petite église orthodoxe du village de Nausicaios sur les pentes du Mont Neritos qui domine le Nord de l’île. C’est sûrement le meilleur endroit d’Ithaque pour assister à un de ces merveilleux lever de soleil célébrés par Homère tout au long des chants de l’Odyssée :

« Et quand parut Aurore aux doigts de rose qui naît de bon matin… »

Baie de Port Polis

Cette architecture typiquement Ithaquienne, qui tient du phare sans lumière et du moulin sans ailes, domine la baie de Port Polis, que Victor Bérard considère comme le port de la cité d’Ulysse.

« Ulysse s’éveillait de son premier sommeil sur la terre natale, mais sans la reconnaître après sa longue absence ; car Athéna, cette fille de Zeus, avait autour de lui versé une nuée, afin que, de ces lieux, il ne reconnût rien et qu’il apprit tout d’elle »
(Odyssée, Chant XIII, 210-215)

Lotofaghia

Au Nord Ouest de l’île, le petit village de Lotofaghia situé sur le domaine supposé de Laerte (père d’Ulysse) entouré de ses champ de lotos qui descendent jusqu’à la mer.
D’après la légende, Ulysse implanta lui-même à Ithaque la culture du lotos, cette drogue que ses compagnons mangèrent chez les Lotophages : « Or , sitôt que l’un deux goûte à ces fruits de miel, il ne veut plus rentrer ni donner de nouvelles » (Odyssée Chant IX, 100-102)
Toujours est-il que le lotos en vente libre sur l’île (ses effets ne se font sentir que sur place) plonge le voyageur dans le simple bonheur d’être là… à n’en plus bouger.

Polyphémia
Baie de Parapigadi

Vue prise au dessus du petit village de Polyphémia qui domine l’îlot de Parapigadi (Sud Est d’Ithaque). C’est ici que, d’après Victor Bérard, Ulysse aurait retrouvé son fidèle porcher Eumée et son chien Argos qui fut le premier à reconnaître son maître après vingt ans de séparation.

« C’est là qu’Argos était couché, couvert de poux. Il reconnut Ulysse en l’homme qui venait et, remuant la queue, coucha les deux oreilles : la force lui manqua pour s’approcher du maître »
(Odyssée, Chant XVII, 300-304)

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